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"Amendement VPN" : mise au point et explications.

Un amendement déposé au projet de loi numérique, qui portait sur la publication de messages sur les réseaux sociaux via un réseau VPN (technique qui rend difficile l’identification de l’auteur du message) a donné lieu à polémique. Pour conserver la sérénité des débats, nous l’avons retiré. Mais cela n’entame en rien notre détermination à voir ce sujet essentiel mieux pris en compte par notre arsenal législatif. Explications.

Un amendement d’appel pour ouvrir un débat nécessaire

En déposant un amendement, cosigné par 24 de mes collègues, visant à proscrire la publication (et non la consultation) sur les réseaux sociaux via une connexion VPN, il est bien évident que je n’imaginais pas son adoption telle quelle et que nous avions conscience qu’il serait probablement nécessaire de retravailler la rédaction avant la séance, pour en préciser la portée.

En revanche, j’entendais interroger l’inefficacité de nos moyens de traque des personnes qui commettent des délits en ligne en utilisant à dessein des systèmes rendant plus difficile, voire impossible, leur identification par les autorités judiciaires. 

Pour être encore plus clair et employer une analogie compréhensible par tous : si la vente et le port de cagoules sont libres en France, la loi proscrit de manifester le visage cagoulé, pour que les autorités judiciaires puissent plus facilement identifier les éventuels auteurs de troubles et de violences lors de manifestations. De la même manière, nous ne souhaitions pas interdire les VPN, mais proscrire l’expression sur les réseaux sociaux à l’abri d’un VPN. 

Des réactions vives, aux significations multiples

Dans les réactions, parfois vives, à la proposition d’amendement que nous avions formulée, je perçois trois motivations très différentes. 

Il y a les réactions d’utilisateurs réguliers de VPN qui ont pu y percevoir une menace sur des usages qui sont devenus leur quotidien – et sans doute n’avons-nous pas assez été explicites pour préciser que le projet d’amendement ne visait aucunement à interdire les VPN, pas plus qu’à empêcher de consulter un réseau social via un VPN. 

Il y a les réactions d’institutions, d’entreprises ou d’organisations qui, utilisant des VPN, ont pu, à juste raison, craindre de voir leur modèle de fonctionnement compromis par l’amendement – et sans doute n’avions-nous pas, dans la rédaction et la définition de la portée du dispositif assez pris en compte leur situation.

Mais il y a aussi les réactions, moins clairement assumées, mais qui ont donné lieu aux messages les plus agressifs, de personnes ou de groupes qui considèrent, sans l’exprimer aussi crûment, que la liberté d’expression sur les réseaux sociaux devrait être quasiment sans limite. Il a été tout de même édifiant de voir réunis dans un même concert d’indignation surjouée Florian Philippot et d’autoproclamés défenseurs de la « neutralité du net ». L’objection généralement formulée (« quand on veut identifier l’auteur d’un délit sur internet, on le peut toujours pourvu qu’on y mette les moyens ») est tellement déconnectée des moyens raisonnablement mobilisables qu’en la matière, prétendre cela revient à nier la réalité. 

La réalité qu’il nous faut combattre, c’est celle de harcèlements, de menaces, d’intimidations proférées sous pseudos, parfois à l’abri de connexions protégées et difficilement identifiables, qui conduisent à des drames. 

La réalité qu’il nous faut changer, c’est celle d’une réponse pénale contrainte par des obstacles technologiques qui permettent aux plus organisés, aux plus dissimulateurs, d’échapper à la justice, tandis que de simples internautes – souvent sous l’emprise de ces entrepreneurs de la haine ou de la désinformation – peuvent être poursuivis. 

Retirer un amendement ne signifie pas abandonner la détermination à agir

Sur la question centrale que j’entends soulever, je poursuivrai, avec mon groupe, et mon rôle d’alerte et mon rôle de proposition et mon rôle d’interpellation du gouvernement.

Face à des trolls professionnels (parfois organisés en véritables usines) qui jouent de solutions technologiques de dissimulation pour échapper à la loi, nos démocraties ne peuvent rester démunies, ou seulement faire confiance aux plateformes.

Les récentes déclarations d’Elon Musk, qui envisage de rendre X (ex-Twitter) payant pour tous, dans le but, dit-il, de réduire la publication de messages postés par des bots devrait faire réfléchir : pour réguler, la loi n’est-elle pas plus légitime que l’argent ? 

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